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jeudi 22 décembre 2016

Interview de Mike Oldfield par Uncut Magazine (Février 2017) - Traduction


Comme promis, après la critique de Return To Ommadawn publiée dans le dernier numéro du magazine Uncut, voici venue l'heure de partager la traduction complète de l'interview de Mike Oldfield qui l'accompagne ! Un entretien de deux pages composé seulement de questions posées par les lecteurs et adressées au magazine il y a quelques semaines. On revient donc surtout sur la carrière du multi-instrumentiste, avec beaucoup d'anecdotes, et finalement très peu sur le nouvel album à paraitre en janvier. Cela peut être un peu frustrant, mais on y apprend quand même de petites choses intéressantes. Je vous laisse découvrir tout ça !


UNE AUDIENCE AVEC MIKE OLDFIELD
Interview par Michael Bonner

"DESOLE" dit Mike Oldfield, interrompant la conversation. "Il y a un oiseau extraordinaire juste à ma fenêtre. Je pense que nous avons des roadrunners [géocoucous] ici, comme dans le dessin animé. Il est à 3 mètres, et il me regarde."
"Ici" c'est Nassau, où Oldfield vit depuis six ans. Il a, c'est flagrant, des tendances nomades. "J'ai déménagé une vingtaine de fois. Les seules choses que j'ai encore avec moi sont mon badge de Blue Peter et une copie originale d'une partition d'Ommadawn."
Ce mois-ci, Oldfield sort Return To Ommadawn - suite de son album de 1975. "J'ai pensé que ce serait amusant," explique-t-il. "Et ça l'était, jouer de tous ces instruments encore une fois. Il n'y avait même pas de rythme à suivre; beaucoup de choses ont été jouées en toute liberté."
Oldfield a vécu plein de choses dans l'intervalle des 40 ans qui le sépare de son premier essai Ommadawn. Pas seulement ses changements géographiques. "Aujourd'hui je me lève très tôt," dit-il. "J'ai adopté le rythme européen quand je vivais à Ibiza. Les gens se lèvent tôt, ils déjeunent et font une sieste, ensuite ils restent debout jusqu'à tard. Donc en me levant à 5h30, je peux avoir deux journées en une."
C'est sur ces mots qu'Oldfield se prépare à répondre à vos questions - sur les ouragans, les Jeux Olympiques et Kevin Ayers.

Valerie Singleton, 1969
Avez-vous toujours votre badge de Blue Peter ? John Yule, Aberdeen
Oui. Je me souviens avoir rencontré Valerie Singleton un jour. Elle avait une émission TV, et je crois que je voulais y aller. Nous avions deux heures de libres avant d'enregistrer donc Valerie Singleton et moi sommes allés au bar de la BBC. Je pense que nous étions un peu pompettes, car lorsqu'elle a commencé l'émission, je regardais et elle paraissait chanceler un peu. C'était de ma faute.
A cette époque, Blue Peter m'avait demandé de faire une version de leur thème musical. Ca n'était pas censé être le thème du générique de l'émission; ils voulaient juste une version faite par moi, et ils voulaient me filmer à la réaliser. Ils étaient très sympas.

Avez-vous entendu parler du duo australien Tubular Bells For Two ? Est-ce que vous approuvé ? Paul Conn, via email
Oh oui - ils font du bon boulot. Je suis assez impressionné. Ils le jouent très bien, surtout vu le fait qu'ils sont seulement deux. Je ne dirais pas que c'est un tribute [hommage]. Ils jouent de la musique; ce n'est pas comme s'ils prétendaient être moi. Il y a de superbes versions de Tubular Bells. La plus récente est russe, sur Tubular Bells II. The Ukulele Orchestra Of Great Britain a fait une fantastique version de Tubular Bells. Il y en a aussi une très bonne de New York jouée par des femmes au synthétiseur.

En moins de deux ans, David Bedford, Lol Coxhill et Kevin Ayers sont partis. Quels souvenirs gardez-vous de la période avec The Whole World ? David Fernandez, via email
J'avais seulement 15-16 ans quand j'ai rejoint The Whole World. Ils avaient l'habitude de m'appeler "Young Michael" [Jeune Michael]. Kevin était adorable. Je l'admirais. Nous avons eu d'incroyables voyages en van. On a connu les autoroutes, les stations services. The Blue Boar, Watford Gap. On croisait souvent d'autres groupes revenant de concerts dans le nord. On a partagé des billets avec des groupes comme Pink Floyd, même avec des groupes de heavy metal. On était tous pareils, tous des musiciens sur les routes. J'ai beaucoup appris de Kevin, Lol et David. Ils m'ont donné leur confiance. Kevin m'a prêté son magnétophone quand nous étions à Tottenham, et c'est sur ce magnéto que j'ai fait les démos de Tubular Bells. C'est aussi ce qui nous accompagne quand on vieillit. Les gens partent beaucoup trop tôt et c'est terriblement triste.

The Whole World, Londres 1970 : (gauche à droite) David Bedford, Lol Coxhill, Kevin Ayers, Mike Oldfield

Avez-vous encore vos anciennes guitares ? Susie Shinn, St Ives
Je ne les ai plus, mais j'ai les nouvelles versions des vielles guitares. Ma toute première guitare était une Telecaster blanche. Je l'ai perdue il y a longtemps, alors j'ai eu une nouvelle blanche. La première que j'avais avait appartenu à Marc Bolan. Mon agent, Roy Guest, travaillait avec Brian Epstein dans le bâtiment du label NEMS, et je crois qu'il l'a juste trouvée posée par-là. Peut-être que Bolan allait pour se procurer une de ces guitares plus élaborées et qu'il n'avait plus besoin de sa vieille Tele, et il a pensé, 'Je vais la donner à ce jeune gamin, voir ce qu'il peut en faire.'

En tant que fan de Star Trek et ayant un intérêt certain pour l'espace, avez-vous réservé un siège dans la navette de Richard Branson ? David Collopy, via email
Un jour j'ai fait l'erreur de monter en ballon avec Richard Branson. Il était le pilote, et nous avons failli nous retrouver dans la gigantesque cheminée de la centrale électrique de Didcot. Au final, nous avons volé tellement haut que nous n'avions plus d'option, et nous nous sommes écrasés sur une boulangerie à Oxford. Nous avons du être secourus par les pompiers. Je me suis promis après ça que je ne participerai plus jamais à quoique ce soit organisé par Richard en rapport avec le fait de voler - à moins que ce soit un vrai avion avec un vrai pilote. Je ne voudrais pas aller dans un vaisseau spatial avec lui, non. J'adorerais aller dans l'espace si c'est assez confortable, comme dans Star Trek, avec l'anti-gravité et un bar comme dans l'Enterprise. Mais c'est un peu tôt pour que le voyage dans l'espace m'intéresse.

Vos aptitudes précoces pour la guitare sont bien connues, mais quand et comment avez-vous appris à jouer du piano ? Rennie LeDuc, via email
Lorsque j'habitais à Harold Wood, Redden Court Road, ma grand-mère est venue vivre avec nous. Elle était pianiste dans un pub à l'époque où les pubs étaient encore des endroits sympas, et que les gens y allaient pour chanter et qu'ils pouvaient fumer. Elle a amené son vieux piano chez nous. Il procurait une atmosphère très agréable. Une grande partie de Tubular Bells a été écrite sur ce piano. J'ai démarré comme tous les autres gamins avec "Chopsticks". Mais je vais vous dire comment cela a vraiment commencé. Il y avait cet album, Rainbow In Curved Air [de Terry Riley], avec un enchainement. Si vous l'écoutez bien, vous jouez une séquence avec une main et cette même séquence en boucle, deux ou quatre temps plus tard, avec l'autre main. Comme lorsque vous tapez votre tête tout en carressant votre ventre. J'étais déterminé, je voulais y arriver.

Vous avez joué à la Cérémonie d'Ouverture des Jeux Olympiques. A quel point était-ce stressant ? Arturo Varona, via email
C'était évidemment stressant dans la soirée, en montant sur scène. C'était le concert N°1 de la Planète Terre pour n'importe quel musicien. Par miracle, c'est tombé sur moi. Je me suis senti faire partie d'une équipe incroyable, avec Danny Boyle à sa tête, qui a donné sa confiance à tout le monde. Mis à part pendant la dernière demi-heure avant d'aller en piste, je n'ai pas pu aller dans les coulisses, car Artic Monkeys avait pris tout l'espace avec leur énorme troupe. J'étais enfermé dans ma loge, de la taille d'une boite à chaussure. J'alternais entre cet endroit et la zone fumeur, qui avait très gentiment été prévue pour nous à l'extérieur des loges.

Qu'est-ce que ça fait de vivre l'expérience d'un ouragan ? Marie, via email
Nous avons eu trois ouragans en six ans. Irene, Sandy et Matthew. Cette maison est bien placée pour les supporter. L'une des choses les plus dangeureuses est que le déferlement peut atteindre six mètres, avec des vagues encore au-dessus. Donc vous n'avez pas envie d'être au bord de l'eau à ce moment-là. De plus cette maison a été construite dans la roche. Donc la façade fait face à l'ocean, l'arrière est dans la falaise. Elle est comme coincée dans la roche, donc elle ne sera jamais soufflée. Le gros problème après un ouragan c'est que vous êtes en pénurie d'eau potable, mais nous avons la chance d'avoir un puits. Nous avons un bon générateur aussi. Faites en sorte d'avoir assez de nourriture pour survivre pendant une semaine et que votre générateur ait assez de fuel. Et puis cachez-vous. Matthew est arrivé un peu après 8h du matin. C'est comme si le diable était dans votre jardin.

Qu'est-il arrivé au chien sur la couverture de Hergest Ridge ? Becky Scott, Oxford
Il s'appelait Bootleg. C'était le lévrier irlandais du Manoir. Il a passé la plupart de son temps lorsque nous enregistrions Tubular Bells sous la table de mixage. Il a eu une longue et belle vie, pour autant que j'en sache.

Vous avez enregistré des suites pour Tubular Bells et maintenant Ommadawn. Pourquoi faire ces revisites ? Nick Walker, Cheam
Etes-vous déjà retourné voir votre ancienne école ou la maison où vous avez grandi ? Parfois on a l'impression que c'est un cycle. Ommadawn était toujours un album spécial, mais ensuite ma relation avec la maison de disque s'est dégradée. J'étais sur le point de ne plus faire assez d'argent, donc il a fallu que je me réinvente au début des années 80. Finalement, "Moonlight Shadow" fut un énorme tube. Je me suis perdu vers la fin des années 80, puis il y a eu Tubular Bells II. Jusqu'à cette époque, on avait des suites pour les films, mais personne n'avait eu l'idée de faire une suite pour de la musqiue. Donc j'ai pris l'idée et ce fut un énorme succès. J'avais toujours voulu faire un album avec un orchestre classique [Music Of The Spheres]. Après avoir fait un album rock [Man On The Rocks], j'ai pensé faire un acoustique. La dernière fois que j'avais fait un album acoustique c'était pour Ommadawn, en 1975. Je me suis dit, "Ouais, ça serait une idée géniale, je vais jouer avec mes mains encore une fois."

Vos spectacles étaient souvent très spectaculaires - avez-vous déjà eu de gros incidents avec l'un d'eux ? Andrew Marlow, Bradford
Oh oui. Au Horse Guards Parade. C'était la première de Tubular Bells III juste à côté de Downing Street. Il tombait des cordes et le générateur qui alimentait les lumières de la scène est tombé en panne. Nous étions en direct sur la TV espagnole et jouions dans le noir. Quelqu'un a réussi à faire augmenter les lumières de la rue. Ce qui est drôle, c'est que le public a adoré le show. Je ne suis pas certain qu'ils ont su que quelque chose d'aussi désastreux s'était produit. En quelque sorte les britaniques adorent ça - ils commencent à faire de véritables fêtes sous la pluie. Ce devait être un désastre; et ça s'est terminé par un triomphe. Ce fut une merveilleuse soirée.

Nous allons découvrir Return To Ommadawn - y-a-t-il une chance de voir un jour une revisite d'Hergest Ridge ? Mark Olds, via email
J'ai mis quelques petits élements d'Hergest Ridge dans Return To Ommadawn. L'introduction possède un murmure en arrière plan avec des sons lointains de flûtes irlandaises, les mêmes que dans Hergest Ridge. C'est une bonne manière de commencer, et ça permet vraiment de rester dans l'ambiance d'Ommadawn à mon avis.

UNCUT - Février 2017, p13-14

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Return To Ommadawn (2017) par Mike Oldfield ; édité chez UMC/Virgin EMI ; date de sortie le 20 janvier 2017. Précommandes / Preorders

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3 commentaires:

Anonyme a dit…

Euh, le type a fait des milliers de kilomètres pour poser uniquement des questions qu'il a récupérées via internet ou les réseaux sociaux, et pas une seule question personnelle !!!

Ça me paraît incroyable !

E-Gwen.

Anonyme a dit…

Ah oui, il faut que je te dise , Orabidoo Blog :

"JE N'SUIS PAS UN ROBOT..." [sur un air français relativement connu]

E-Gwen.

Geinoh a dit…

Le fameux tribute russe à Tubular Bells II est à écouter !
Voici le lien :
https://www.youtube.com/watch?v=6QURW8yl0AA
Bonne écoute !